Les décisions de justice se succèdent dans le monde du transport de personnes, des taxis et des VTC. Après les ordonnances de référé du Tribunal de commerce de Paris, c’est au tour du Conseil d’Etat de se prononcer sur le sujet dans une décision du 17 décembre 2014.
Rappelons d’emblée que la question traitée par le Conseil d’Etat, juridiction suprême de l’ordre administratif français, n’est pas de la même nature que celle soumise au Tribunal de commerce ou au Tribunal de grande instance. En effet, il s’agit de la question de la légalité du décret pris en application des dispositions légales du Code des transports.
Encore une fois, constatons que l’économie collaborative et ses avatars posent des questions juridiques de tous ordres, puisqu’elles sont portées tout à la fois devant les juridictions pénales, civiles et administratives.
Le décret du 27 décembre 2013
Les sociétés Allocab et Voxtur (société exploitant « Le Cab ») contestaient dans leurs requêtes déposées au Conseil d’Etat la légalité du décret du 27 décembre 2013 relatif à la réservation préalable des voitures de tourisme avec chauffeur.
Ce décret avait remplacé l’article D. 231-1-1 du Code du Tourisme par un nouvel article R.231-1-1 aux termes duquel il énonçait que « [l]a réservation préalable d’une voiture de tourisme avec chauffeur […] est caractérisée par le respect d’un délai minimal de quinze minutes entre la réservation du véhicule et la prise en charge effective du client ».
L’existence de ce délai de quinze minutes étant un frein considérable pour le développement de l’activité des VTC, ce texte a fait l’objet d’un recours et d’une vive polémique, à tel point que son exécution avait été suspendue le 5 février 2014 par une ordonnance du Conseil d’Etat.
Désormais, ce décret est annulé, c’est-à-dire que le Conseil d’Etat vient de le priver de toute existence juridique, au moyen d’un raisonnement juridique limpide.
Le raisonnement du Conseil d’Etat fondant l’annulation du décret du 27 décembre 2013
Le Conseil d’Etat considère d’abord les articles L. 3121-3 et L.3121-11 du Code des transports qui fixent les conditions d’exercice de l’activité de taxi, puis constate que les articles L. 231-1 et suivants du Code du tourisme fixent les conditions d’exercice de l’activité de VTC, en renvoyant à un décret le soin de fixer les conditinos d’application de ces dispositions légales.
Le Conseil d’Etat considère alors qu’il résulte clairement de ces textes que le législateur a entendu distinguer les activités de taxi et de VTC mais que les dispositions du Code du tourisme n’ont pas autorisé le pouvoir réglementaire à fixer des conditions nouvelles restreignant l’activité des VTC en subordonnant la prise en charge de clients à un délai de réservation de quinze minutes.
C’est le fait que le décret fixe une condition nouvelle à l’activité des VTC qui n’avait pas été prévue par la loi qui conduit le Conseil d’Etat à considèrer que ce texte est illégal. En effet, pour être régulière, la condition relative à la réservation préalable aurait dû être introduite par le biais d’une loi et non d’un simple décret du Premier ministre, texte de nature réglementaire.
Dès lors, le Conseil d’Etat a conclu que le décret est entaché d’illégalité et doit être annulé puisqu’il ajoute à la loi des conditions qu’elle ne prévoyait pas.
Droit du Partage va continuer à suivre de près les évolutions à venir pour vous dès le début de l’année 2015.