Un chauffeur Uber reconnu comme salarié aux Etats-Unis

Nous avions déjà eu l’occasion de vous faire part de notre analyse du droit du travail dans l’économie collaborative (voir notre article) et de nos interrogations concernant le statut des chauffeurs de VTC (voir notre article et notre intervention à la radio). Mardi dernier (le 16 juin 2015), la Commission du Travail de Californie (« Labor Commission of the State of California« ) a rendu une décision qui sera sans doute longuement commentée puisqu’il a été jugé qu’un chauffeur Uber n’était pas un travailleur indépendant mais un salarié (retrouvez la décision complète ici).

L’audience a été tenue le 10 mars 2015 entre le demandeur (Barbara Ann Berwick) et le défendeur (Uber Technologies Inc et Raiser – CA LLC) pour que le dossier soit débattu. Le demandeur sollicitait que la Commission lui reconnaisse la qualité de salarié puisque les conditions concrètes d’exécution de son travail ne correspondaient pas à celles d’un travailleur indépendant. En réponse, Uber s’est défendue en affirmant qu’elle n’était qu’une plateforme technologique neutre mettant en relation des chauffeurs et des clients pour des services de transports.

Cependant, il a ainsi été jugé que « in light of the above [c’est à dire les différents arguments], Plaintiff [le chauffeur] was Defendant’s [Uber] employee« . Cette décision a notamment été prise sur la base des éléments suivants :

  • le travail du chauffeur était partie intégrante de l’activité économique d’Uber, laquelle n’existerait pas sans les chauffeurs ;
  • Uber contrôle l’ensemble des outils et moyens à disposition des chauffeurs, en particulier la fourniture de l’application Iphone qui est centrale (« essential to the work« ) ;
  • les passagers payent un prix fixe à Uber, lequel reverse aux chauffeurs une commission non négotiable ;
  • le travail du chauffeur n’implique aucune compétence managériale qui pourrait affecter ses profits/pertes ;
  • Uber intervenait dans tous les aspects de l’opération et n’était pas une simple plateforme de mise en relation.

Bien que cette décision ne soit pas obligatoire (ainsi que le souligne Uber), c’est à notre connaissance une première mondiale qui démontre combien est sensible le statut des chauffeurs de VTC. Malgré l’intérêt économique de ces nouvelles entreprises, le juge demeure gardien de la légalité en sanctionnant un recours injustifié à un travailleur indépendant (c’est à dire en lieu et place d’un salarié). Il serait intéressant de savoir ce que le Conseil de Prud’hommes déciderait dans un pareil cas en France.

Uber a annoncé qu’un appel serait interjeté et Droit du Partage continuera de suivre ce sujet passionnant qui n’est pas prêt de se tarir !

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2 Commentaires

Classé dans Droit du travail et requalification, Evolution du cadre juridique, Transport de personnes

2 réponses à “Un chauffeur Uber reconnu comme salarié aux Etats-Unis

  1. JEROME PIMOT

    Merci pour cet article.
    Et pour faire suite :
    À voir, le décision tendu le 2 juin prochain par les Prud’hommes, pour savoir s’ils se declarent COMPÉTENTS pour requalifier 3 contrats d’intermédiation (2 « collegues » et moi) de livreurs « indépendants » de repas à domicile.

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